Franck Ferrand, membre du jury du Prix du Patrimoine hospitalier porté par la Fondation avec la Sauvegarde de l’Art Français. Interview.

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Franck Ferrand, membre du jury du Prix du Patrimoine hospitalier
© La Sauvegarde de l’Art Français

Unies par un objectif commun de soutenir un patrimoine hospitalier trop souvent méconnu du grand public, la Fondation Française de l’Ordre de Malte et la Fondation la Sauvegarde de l’Art Français ont souhaité s’associer pour mettre en lumière l’importance de le sauvegarder.

Ce nouveau Prix de la Fondation Française de l’Ordre de Malte en partenariat avec la Sauvegarde de l’Art Français, vise à soutenir significativement des initiatives exemplaires de restauration en France du patrimoine hospitalier religieux ouvert au public et/ou du patrimoine religieux de l’Ordre de Malte : églises, chapelles, oratoires, etc.
Il permet de valoriser des sites à forte dimension historique et mémorielle, tout en leur offrant une seconde vie au service de la société et des malades.

En tant que mécène, la Fondation Française de l’Ordre de Malte offre au lauréat qui sera annoncé d’ici fin 2025, un soutien financier pour permettre la sauvegarde du site ou de l’œuvre.

Un jury d’exception du Prix du Patrimoine hospitalier 2025

  • Jean-Pierre Mazery, Président d’honneur de la Fondation Française de l’Ordre de Malte
  • Olivier de Rohan Chabot, Président de la Sauvegarde de l’Art Français
  • Jean-Marie Decazes, Professeur de médecine, Vice-président de la Fondation Française de l’Ordre de Malte
  • Jean-François de Canchy, Inspecteur Général des Affaires Culturelles, représentant le ministère de la Culture au Conseil de la Fondation Française de l’Ordre de Malte
  • Alice Capron, Architecte en Cheffe des Monuments Historiques
  • Franck Ferrand, écrivain et animateur engagé dans la transmission de l’histoire et du patrimoine
Un jury d’exception du Prix du Patrimoine hospitalier 2025
© La Sauvegarde de l’Art Français

 

Interview de Franck Ferrand, membre du jury du Prix du Patrimoine hospitalier 2025

Quels sont vos liens avec la Sauvegarde de l’Art Français et la Fondation Française de l’Ordre de Malte ?

Mes liens avec la Sauvegarde passent d’abord par des liens d’affection et de proximité avec son président puisqu’Olivier de Rohan Chabot est un ami de très longue date. Je me rappelle très bien la toute première fois que je suis venu dans ces locaux. C’était il y a un quart de siècle maintenant. Il m’a dit : « Venez nous voir à La Sauvegarde ! » Je n’ai eu qu’à traverser la rue puisque j’habitais rue de Douai, juste de l’autre côté. Ça n’a pas été un trop long voyage. J’ai été impressionné par tout le travail qui avait été fait ici. Ce qui m’a le plus frappé, c’est la jeunesse de cette équipe extrêmement active qui ne manque quasiment aucune des souffrances, aucune des misères, aucune des difficultés que peut traverser le patrimoine religieux en France. Je connais l’Ordre de Malte d’une manière beaucoup plus formelle, je dirais institutionnelle. Je me suis, dans une autre vie, beaucoup intéressé à l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem et aux chevaliers Hospitaliers, dont les chevaliers de Malte sont aujourd’hui les descendants directs. J’ai eu l’occasion de fréquenter à peu près toutes les fondations à travers l’Europe, et même dans le monde. Il suffit d’aller dans les contrées alémaniques, dans le centre de l’Europe, dans d’autres pays du monde pour voir à quel point le rôle, la présence, l’activité des chevaliers de Malte sont absolument essentiels dans tous les domaines de la charité, de la bienveillance, de l’assistance aux personnes. C’est peut-être un petit peu moins le cas en France pour des raisons qui sont historiques.

Qu’est-ce qui vous touche dans le patrimoine hospitalier ?

Les niches du patrimoine sont innombrables. Il existe un patrimoine périurbain, un patrimoine animalier, un patrimoine artisanal qui, en ce qui me concerne, me touche particulièrement. Dans le cadre général du patrimoine religieux, il y a un domaine qui n’est presque jamais traité : celui des chapelles d’hôpitaux. Je trouve que ce sont des endroits extrêmement importants et poignants, en raison de la mémoire qu’ils mobilisent et dont ils sont imprégnés. Vous imaginez toutes les prières qui se sont élevées de ces chapelles d’hôpitaux. Vous imaginez toutes les souffrances – et aussi tous les grands réconforts – qui ont eu ces lieux-là pour cadre. Je trouve cela absolument magnifique et puis ça n’est pas seulement de la mémoire et du patrimoine. C’est aussi de manière très active un lieu de réconfort, un lieu de recueillement, un lieu de sérénité, dont ont besoin les établissements hospitaliers qu’ils ont tendance, pour beaucoup d’entre eux, à oublier. De nos jours, les chapelles sont de moins en moins entretenues, de moins en moins disponibles. Il y a un vrai travail à faire et je ne parle pas simplement des chapelles catholiques. Ce sont des chapelles qui accueillent en vérité les malades et leurs familles, quelle que soit leur confession religieuse. Et même, j’ai quelques exemples frappants à la mémoire des personnes qui ne sont pas religieuses du tout. C’est évidemment la mission de ces héritiers des Hospitaliers que sont les chevaliers de Malte. C’est aussi la mission d’une fondation comme la Sauvegarde de l’Art Français car dans « l’art français », il y a aussi « l’art » au sens le plus quotidien, le plus vivant et le plus spirituel qui soit.

Qu’est-ce qui vous a motivé à rejoindre le jury de ce nouveau prix ?

Je participe à de nombreux jurys et, pour tout vous dire, l’une de mes activités consiste à m’en désinscrire car cela prend beaucoup de temps. Je suis très sollicité, je ne suis pas toujours le plus compétent. Il est très délicat, vous savez, quand vous êtes autour d’une table avec votre petit café et votre croissant, de juger du sort des candidats qui se sont, pour certains, dépensés depuis des mois pour essayer de monter le dossier le plus convaincant possible. Il ne faut jamais oublier que derrière les dossiers qui se sont présentés, il y a le travail, l’espoir, peut-être parfois aussi la vie, d’un certain nombre de personnes. J’essaie d’apporter ce qu’on pourrait appeler un œil neuf, un regard extérieur. J’essaie de donner ce que je peux aux délibérations des différents jurys auxquels j’ai eu l’honneur de participer, c’est-à-dire : un peu de bon sens. Je n’ai pas eu beaucoup de travail à faire dans ce jury-ci puisque j’ai été frappé de voir la quantité de bon sens qui s’est exprimé autour de la table.
Ce qui est assez beau, c’est que j’étais d’accord avec plusieurs. Quand je dis d’accord, c’est entièrement d’accord de A à Z, avec plusieurs des membres du jury, infiniment plus qualifiés que moi. Cela m’a à la fois rassuré sur ma légitimité à y siéger et sur l’utilité même de ce prix.

En tant que passionné d’histoire, quel regard portez-vous sur l’importance de ce prix dans la mise en valeur du patrimoine hospitalier ?

Je pense que le patrimoine et l’histoire de même que le patrimoine, l’histoire et la mémoire sont des notions liées, connexes. Il faut d’abord, et avant tout, faire de l’histoire pour entretenir une mémoire. Et cette mémoire s’appuie sur un patrimoine. J’essaie dans la mesure du possible même si, par rapport à mon ami Stéphane Bern, je suis, par ailleurs, moins impliqué, d’apporter ma petite pierre à l’édifice, malheureusement en grande difficulté. Les fissures, les lézardes, les éboulements sont de plus en plus fréquents et de plus en plus nombreux dans un patrimoine que nous avons du mal à entretenir. C’est un manteau qui devient un peu grand pour la petite chose qui nous sommes devenus. Je pense qu’il faut savoir, et ça c’est aussi mon rôle, motiver les gens eux-mêmes. Les institutions se désinvestissent, les crédits ne sont plus ce qu’ils étaient, la quantité des demandes devient presque étouffante. Ce qu’il faut peut-être, c’est que les gens se retroussent les manches, que le public lui-même comprenne tout ce qu’il peut faire. De ce point de vue-là, si je peux mettre mes tribunes et mes porte-voix au service d’un certain nombre de bonnes causes, eh bien j’estime que je ne perds pas mon temps.

Quels critères vous semblent essentiels pour distinguer les projets et désigner le lauréat ?

Il y a ce qu’on peut dire et ce qu’on ne peut pas dire. Je pourrais vous faire tout un blabla très officiel sur les critères qui déterminent le jury. Ce qu’on ne dit pas, c’est-ce que je vais vous dire maintenant. Il faut qu’un prix fasse parler de lui. Il faut qu’un prix soit compris par l’opinion. Il faut qu’un prix puisse avoir une utilité concrète et pour ça, il y a trois critères. Le premier critère, c’est que nous ne soyons pas dans un projet de trop grande envergure car il faut que le prix puisse véritablement changer le destin du lieu ou du projet dont on parle. Le deuxième critère, c’est qu’il faut que le lieu en question soit le plus en adéquation possible avec l’objet du prix. Et puis, soyons très honnêtes, il y a un troisième critère auquel je suis tout particulièrement sensible parce que c’est mon métier : il faut qu’il y ait une belle histoire à raconter.

En savoir plus sur le Prix : https://fondationordredemalte.org/prix-patrimoine-hospitalier-porte-par-fondation-avec-sauvegarde-art-francais/

La Fondation apporte son soutien à la sauvegarde et la protection du patrimoine historique et culturel chrétien ou lié à l’Ordre de Malte.

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